Quand il fut inauguré, chacun y alla de son commentaire ou de son anecdote, croustillante s’il en est. Selon un vieux garçon de notre voisin, cet endroit aurait été un lieu de rencontres amoureuses. Des amours ou amourettes auraient vu le jour sous ses ailes ; pas les siennes ! L’endroit n’était pas confortable et n’offrait aucun abri décent. Balayé par les vents froids de l’hiver, écrasé de soleil et des vents secs de l’été, aucune haie ou simple arbre n’y poussait. Les hauts plateaux du Cantal peuvent être assez désertiques.
Le vieux moulin ne se résumait qu’à un mur de pierres dont l’entrée était obstruée depuis de nombreuses années. De mémoire d’hommes, personne ne se souvenait y avoir vu des ailes. Si maintenant il est la fierté des gens du coin, lors de sa restauration, il n’en fut pas de même. Le village était divisé… Il y avait ceux qui n’y voyaient qu’un tas de pierres à raser, et ceux qui y voyaient une mémoire du passé, à préserver.
J’ai assisté à la mise en marche de cet outil, l’installation de la voilure, l’équilibrage de la meule dans un vacarme sans nom ; le craquement de la mécanique toute neuve n’avait rien de rassurant. La force du vent, ainsi capté, était impressionnante et conférait aux rouages quelque chose de magique. J’ose à peine imaginer la peur du meunier, lorsque, un siècle plus tôt, il dut prendre ses jambes à son cou pour abandonner son moulin à un Éole en furie. Aujourd’hui, pour le faire visiter et par là même, se faire une idée plus précise de son fonctionnement, un moteur électrique a été installé. C'est chez moi, et je laisse ce personnage pittoresque vous en parler et vous en faire la visite.