Le teint halé, et le visage buriné par la vie, étaient les signes extérieurs visibles de celles et ceux qui vivent en contact direct avec les éléments. Cela faisait des mois que je le voyais plus ou moins régulièrement sur le bord de la route, le pouce tendu, matin comme soir, sur mon chemin du travail. Il devait travailler quelque part, plus loin que moi, et je me fis la réflexion que ce ne devait pas être très facile de respecter des horaires fixes, avec un moyen de transport aussi aléatoire… Un jour que j’étais dans de meilleures dispositions, je décidais de m’arrêter. De près, son visage paraissait encore plus marqué, et je ne savais pas lui donner un âge précis. Visage hyper bronzé, cheveux blanchis par le soleil, et deux yeux d’un bleu très pâle. Une bonne tête, trahie par une odeur que je reconnus en un centième de seconde ; de ces effluves qui collent à la peau aussi sûrement qu’une tique à un chien, et propre à ceux qui consomment très régulièrement et sans modération, le contenu d’une soi-disant « dive » bouteille, le plus souvent étoilée…
Une vinasse sans nom, résultat de la greffe d’un mauvais pied de vigne et de fil de fer barbelé ; un assemblage parfaitement réussi d’imbuvable et d’infecte, un tord-boyaux. Les qualificatifs me manquent, tant je connais les ravages de cet élixir de dépérissement. Cependant, je ne voulus pas m’arrêter à cette première impression, mais je savais… Nous avons partagé la route d’autres fois encore, jusqu’à la fois de trop…
Enfant, le fameux sketch, dit, de l’eau ferrugineuse, de
Bourvil, (ici) ne m’a, ne faisait rire personne… Je ne comprenais même pas comment on
puisse en rire ! Depuis, le temps a fait son œuvre et permis de finir par pardonner.