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lundi 31 mai 2021

Lui

 

Le teint halé, et le visage buriné par la vie, étaient les signes extérieurs visibles de celles et ceux qui vivent en contact direct avec les éléments. Cela faisait des mois que je le voyais plus ou moins régulièrement sur le bord de la route, le pouce tendu, matin comme soir, sur mon chemin du travail. Il devait travailler quelque part, plus loin que moi, et je me fis la réflexion que ce ne devait pas être très facile de respecter des horaires fixes, avec un moyen de transport aussi aléatoire… Un jour que j’étais dans de meilleures dispositions, je décidais de m’arrêter. De près, son visage paraissait encore plus marqué, et je ne savais pas lui donner un âge précis. Visage hyper bronzé, cheveux blanchis par le soleil, et deux yeux d’un bleu très pâle. Une bonne tête, trahie par une odeur que je reconnus en un centième de seconde ; de ces effluves qui collent à la peau aussi sûrement qu’une tique à un chien, et propre à ceux qui consomment très régulièrement et sans modération, le contenu d’une soi-disant « dive » bouteille, le plus souvent étoilée…

Une vinasse sans nom, résultat de la greffe d’un mauvais pied de vigne et de fil de fer barbelé ; un assemblage parfaitement réussi d’imbuvable et d’infecte, un tord-boyaux. Les qualificatifs me manquent, tant je connais les ravages de cet élixir de dépérissement. Cependant, je ne voulus pas m’arrêter à cette première impression, mais je savais… Nous avons partagé la route d’autres fois encore, jusqu’à la fois de trop…

Enfant, le fameux sketch, dit, de l’eau ferrugineuse, de Bourvil, (ici) ne m’a, ne faisait rire personne… Je ne comprenais même pas comment on puisse en rire ! Depuis, le temps a fait son œuvre et permis de finir par pardonner.

 

10 commentaires:

  1. J'ai vu des gens se perdre dans l'alcool. Je sais comme c'est difficile à vivre pour les proches. J'ai vu des proches d'alcooliques sombrer eux-mêmes dans la bouteille. Quelquefois on ne peut rien pour aider les gens, surtout quand ils n'ont pas envie de s'en sortir.
    Je n'ai pourtant jamais pris le sketch de Bourvil pour de la raillerie. J'y ai plutôt toujours vu quelque chose de pédagogique. D'ailleurs Coluche, plus tard, avec son sketch "Gérard", a fait la même chose, mais de façon encore plus mordante.
    Dans les 2 cas, on est plus sur une critique de la société que de l'individu. Du moins c'est toujours ainsi que je l'ai perçu.
    Bises de bord de mer ensoleillé :-)

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    1. Le sketch de Bourvil est gentillet. Enfant, je le prenais au premier degré. Même s'il est plein de jeux de mots, je ne trouvais pas drôle du tout.
      Les ravages de l'alcool sont terribles, et je les ai côtoyés de près. Dans un premier temps, pour se protéger, on rejette tout. L'école, l'entrée en pension ont été salutaires, une échappatoire. Le départ de la ferme familiale à dix-sept ans s'inscrit dans la même démarche.
      Malgré cela, j'ai toujours eu un lien particulier avec mon père. J'ai commencé à le comprendre à partir de trente-cinq ans ; non pas qu'il fut plus sobre, mais il consommait beaucoup beaucoup moins et ses facultés mentales étaient restées intactes.
      Bises du massif central sous l'orage qui arrive :-)

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  2. Tu racontes bien, purée !
    pour le reste, je rejoins La Baladine, j'ai moi aussi également pensé à l'excellent sketch de Coluche (je n'arrive plus d'ailleurs à prononcer "Gérard" normalement :-))
    Belle journée à toi

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    1. Purée, tu complimentes bien ! ;-)
      Longtemps je n'ai pas aimé ce sketch de Coluche, même encore ! Ça marque à vie. Cependant, tout n'est pas aussi noir, ni complétement blanc. J'ai d'excellents souvenirs d'avec mon père.
      Il avait de l'humour et aussi parfois de bons mots, que j'utilise régulièrement.

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  3. Intéressant parallèle entre la chanson de Graeme Allwright et le sketch de Bourvil. À ce dernier j'ai beaucoup ri dans ma jeunesse. J'ai même imité. Aujourd'hui je redécouvre : glaçant !
    Qui était donc « Lui » ?
    De ces personnes à la fois proches et à la fois étrangères.
    De celles et ceux que l'on recueille parfois dans le pardon.
    J'ai donné des formations sur le thème de l'aide à la personne, aux bénévoles des AA (alcooliques devenus abstinents, et se qualifiant toujours d'alcooliques, dont l'engagement dévoué est « sans bornes », ce qui devient le problème en déplaçant le « sans bornes » à cet endroit-là…). J'ai entendu des récits dont je n'imaginais même pas qu'ils puissent correspondre à des réalités).
    C'est parfois possible de sortir de la drogue, ce n'est pas possible de sortir de l'alcoolisme, disait l'addictologue… mais on peut être abstinent.
    Alors bien entendu je ne sourirai même pas aujourd'hui au sketch de Bourvil, qui est pourtant un acteur que je chéris énormément pour d'autres raisons directement liées à mon atteinte par la poliomyélite. Comme quoi… les mystères des relations…

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    1. Pour les besoins de mon texte, « lui » était un auto-stoppeur que j'ai véhiculé maintes fois. J'ai arrêté le jour où il ne tenait plus debout et s'est vautré en montant dans ma voiture. J'ai croisé les doigts pour ne plus avoir à le rencontrer.
      Il y a quelque temps, nous nous sommes croisés, il ne m'a pas reconnu, du tout.
      Comme un parallèle, « lui » était un proche, si proche que nous nous comprenions sans même avoir besoin de nous parler.
      Un proche , si lointain, quand il était dans cet état second, un étranger !
      Je pourrais aussi te raconter des choses incroyables...
      Heureusement pour nous, les enfants, l'école, la pension, puis plus tard l'autonomie ont permis de se dé-cabosser et de re-carrosser l'ensemble.
      Je ne suis pas trop mécontent du résultat :-)
      Quant au sketch d'André Raimbourg,comme d'autres du même acabit, cela ne fait plus rien, sinon sourire.

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  4. Qui ne connait, une personne qui noie son chagrin ou son mal être dans l'alcool ? il est certainement vrai que sur le moment cela doit faire du bien mais quelle addiction .........avec ton récit j'ai eu l'impression que tu décrivais certaines personnes que j'ai connu parce que finalement ils se ressemblent bien souvent.
    Tu l'as écrit de façon admirable.
    https://www.youtube.com/watch?v=phq4Ex88Bz0

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    1. Moi-même, il m'est arrivé de noyer quelques chagrins dans l'alcool ; je n'ai aucune résistance !
      Je préfère partager le verre de l'amitié, et je dois avouer que malgré cela, j’aime le vin, comme quoi !
      Merci pour cette chanson, inconnue de mon répertoire. J'ai cru un instant qu'il s'agissait de celle-là ♫♪♫♪♫♪♫

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  5. C'est un délicat problème que celui de l'alcool. J'ai donné aussi. Je ne supporte pas les gens alcoolisés. Pourtant, beaucoup parmi mes proches, relations comme famille, souffre de cette maladie. Sans doute, comme pour toi, l'enfance... On en guerrit difficilement.

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    1. Comme tu peux t'en douter, je suis comme toi, je ne supporte pas. Ce que je ne supportais encore moins, c'était de voir que des personnes "bien intentionnés" en profitaient...
      Çà nous écœurait ...Mais qu'est ce qu'un, des gamins pouvaient bien y faire ?
      Si ce fut un vaccin, il a été d'une efficacité redoutable

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