Si je vous parlais de mon métier ? Ben non Xoulec, tu dérailles ! Tu en as déjà parlé ici, clic. Mille pardons, c’est que j’avais la tête ailleurs. Faut que je vous dise, mon métier est assez diffèrent de mon travail. L’un découle de l’autre, et je sais être intarissable sur le sujet.
J’ai appris mon métier en regardant mon père le pratiquer à ses heures perdues. À mes yeux d’enfants, il savait tout faire. Des trucs utiles à la ferme, charrette, tombereau, chaises pour la traite des vaches, manches, râteaux, mais pas de la méduse… Et puis aussi, des petits jouets, une luge. C’est fou comme le bois est une matière polyvalente ; tout aussi fou aussi, le nombre d’objets dont une maison regorge.
Me revient aux oreilles le sifflement particulier du fer de la varlope, déroulant de jolis rubans de bois, aussi fins que du papier d’harmonie. Cet outil était magique. Il redressait le bois et le rendait « doux » au toucher. J’ai appris ce qu’était un tenon, une mortaise, un mouton et sa gueule-de-loup, une noix et sa contre-noix. Le vocabulaire technique était riche de mots nouveaux. Un vilebrequin, qui servait à vilebrequiner ; un trusquin, à trusquiner ; un bédane qui ne servait pas à bédaner, mais à exécuter des mortaises, que je sais encore faire.
Travailler le bois avec des machines modernes est nettement moins poétique. C’est bruyant et dangereux. Je ne saurais dire le nombre de menuisiers que j’ai croisés dont les mains n’étaient pas complètes… Rassurez-vous, je possède mes dix doigts. Se servir de la machine pour arriver à ses fins, et non pas servir une machine ; eh oui, l’informatique et le numérique sont passés par là… C’est moins dangereux, moins pénible, mais plus bruyant. À la limite de l’avilissement.
Trop souvent, en regardant mes collègues, j’ai eu l’impression de voir Charlot dans les temps modernes ! Remarquez, quand je suis en poste à la scie de débit, j’ai tout le loisir de penser à un tas de choses sans lien avec le boulot. Comme par exemple, écrire ce billet. Aucun risque de se blesser, c’est bourré de sécurité en tous genres.
Vous l’aurez compris, j’aime façonner le bois à ma façon, pas à celle d’un programmateur à l’aide d’un robot téléguidé. Je me rends compte, maintenant, que je ressemble de plus en plus à un vieux dinosaure à qui on apprend plus à faire des grimaces.
Ci-dessous, mes derniers ouvrages façonnés par mes soins.
Un grand frère...
Trois plots de découpe, confectionnés avec le restant de bois de ma bibliothèque
Un cale-livre réalisé avec le restant de bois de mes plots de découpe