présentation

samedi 15 avril 2023

Les fleurs du mal

   


La ferme avait définitivement cessé de respirer. La dernière vache avait quitté l’étable pour celle du voisin ; elle allait  pouvoir enfin se rendre compte elle-même si l’herbe était vraiment plus verte ailleurs…  Le matériel agricole avait trouvé preneur, et les terres en vente avaient été préemptées par un organisme qui allait se charger de les redistribuer inéquitablement… la SAFER, pour la nommer explicitement. Un tel niveau d’incompétence mérite d’être souligné… Alors que nous avions trouvé des acheteurs pour chaque parcelle, cet organisme n’en trouva pas ; allant à en proposer à ceux là même à qui elle avait ôté la terre de la bouche. C’était consternant. Certaines devinrent des friches, d’autres ont été accaparé. Mais laissons cela de côté.

Notre grange, libérée, délivrée du matériel, était  située en plein centre du village, et, à ce titre, attisait la convoitise d’un voisin mitoyen. Par bouches et oreilles interposées, nous avions eu vent  de ses velléités d’utilisation, voire d’achat, pour une bouchée de mauvais pain. Se croyant tout permis, et profitant de l’âge avancé de mes parents, il squatta  les lieux aussi simplement que cela. Nous avions déjà eu affaire à cet individu,  (clic), aussi, nous n’allions pas nous laisser déposséder de notre bien aussi facilement.

À la faveur de travaux publics dans le village, et en échange de deux bouteilles d’un divin breuvage, mon père fit creuser un fossé en limite de propriété. Certes symbolique, mais pour l’heure, suffisant pour arrêter notre squatter. 

 

“ T’as vu ce qu’ils m’ont fait ?”, confia t-il à notre ami d’enfance.

  

Dans un petit village, tout fini par se savoir...

Il n’allait pas être déçu de la suite que nous lui réservions… Quand on a affaire à des gens tordus, il faut être plus tordu qu’eux. Cette tranchée fut comblée de terre arable, et tout un chacun pu y voir s’épanouir, au printemps suivant, un superbe alignement de fleurs et arbustes du plus bel effet.

Nous avions enjolivé une partie du village, et notre squatter ne pouvait plus raisonnablement y entreposer son matériel sans tout ravager et se le faire reprocher. Ce fut bien-là la démonstration du pouvoir des fleurs…

L’année suivante, la mairie nous emboîta le pas, et d’autres endroits propices furent fleuris à leur tour. Mais ça, c’est une autre histoire…