J’ai lu, quelque part dans la presse régionale, que des chênes provenant de la forêt de Tronçais allaient être abattus en vue de fabriquer la nouvelle charpente de feu notre dame de Paris. Couper un arbre m’a toujours peiné, et je réalise que j’ai planté plus d’arbres que je n’en aie coupé. Peut-être, d’une certaine manière, pour me faire pardonner…
Il était là, caché, non pas par des hautes herbes, non, il était là, confondu dans ces petites que l’on dit mauvaises, au jardin. Il avait eu beaucoup de chance, car il avait échappé aux griffes redoutables du motoculteur, mais aussi à mes mains agiles qui extirpaient à tour de bras ces mêmes petites herbes qui s’accrochent à la terre après le passage de la mécanique. C’est là, en mauvaise posture, que je le vis. Haut comme trois pommes, il semblait m’attendre. Je l’ai saisi avec toute la délicatesse dont je sais faire preuve, en veillant à ne pas détériorer sa racine principale. Plus tard, elle s’enfoncerait dans le sol, tel un rostre, pour y assoir sa stabilité.
L’identification fut très facile, sans même une application smartphoniènne. Des radicelles et un tout petit tronc, pas plus gros qu’une allumette, émergeaient d’une coquille de noix. Elle avait probablement roulé sa bosse jusque dans le jardin, stoppé sa course folle dans les feuilles de salade, à moins que ce ne soit un écureuil maladroit qui l’eut perdu ; j’en doute. La petite graine avait germé avec les faveurs du printemps, et ce petit noyer fit sa convalescence sous mon attention. À l’automne, après avoir longuement choisi son emplacement, je le plantais. Il a aujourd’hui vingt et un ans, il me dépasse de plusieurs mètres, et me donne les plus beaux fruits qui soient.
Je ne connais pas sa variété, et je n’y accorde aucune importance. Je l’appelle le noyer de Guillaume. C’est un peu mon fils.
Pêchers, mignons |