Il y avait, posé sur les entraits retroussées de la charpente du grenier, des planches auxquelles nous avions interdiction de toucher. Elles nous faisaient diablement envie, pour satisfaire nos désirs de cabanes ou autres inventions en tous genres. S’en emparer, sans attirer l’attention de mon père, était du domaine de l’impossible. Quand bien même, tôt ou tard, il aurait fini par découvrir la forfaiture. Nous nous contentions de lorgner dessus comme sur une gourmandise interdite. Juste à côté, reposaient en paix les béquilles du grand-père ; celles-là même qu’il avait ramenées de cette maudite guerre que tout le monde se plaît à dire qu’elle était grande… Grande par son atrocité, certainement.
À en juger par la couche de poussière qui uniformisait l’ensemble, les planches semblaient avoir le même âge. Je soupçonne mon père de n’y avoir jamais touché. Ainsi, cela faisait plus de septante ans qu’elles attendaient je ne sais quoi, je ne sais qui. Je ne savais pas encore que ce serait moi...
Des années plus tard, mon diplôme en poche et ma précieuse machine à bois, mon père me donna le droit d’en faire ce que je voulais. Je dois dire que les lyctus et autres vrillettes, elles aussi, en avaient fait autant. Ces bestioles s’en étaient donné à mandibules joie. Des deux planches de noyer, complètement vermoulues, je réussis à extraire quatre bouts de bois qui me réchauffèrent le cœur à la manière d’une petite bricole, un cadre pour un petit miroir. Des autres en merisier, j’ai pu débiter le piètement de mon tout premier meuble.
Un « argentier » de style louis XVI.
Inutile de vous dire que c’est un style que j’aime particulièrement. Des lignes droites, des courbes très épurées, des sections fines, pas de superflus, pas de fioritures.
Avant d’écrire ces lignes, je ne m’étais pas rendu compte que la description que j’en fais, d’une certaine façon, me ressemble ; au risque de paraître prétentieux. Ma récente bibliothèque est un parfait exemple de simplicité des lignes.
LA VACHE !
RépondreSupprimerOups, pardon.
Purée, mais tu es un artiste ! vraiment !!!!
une VACHE, où ça... ! Délia, au secours ! ;-)
SupprimerPS Comment se fait-il que tu dises "septante" ?
RépondreSupprimer"septante", ben oui, dans le sud, on utilise pas, normalement.
SupprimerMais cette dénomination, depuis que ma petite sœur l'a ramené de chez les ch'tis, me plaît beaucoup et me paraît plus juste.
Oh Biloute ! Koché qu'teu racont' ti'zot !
SupprimerHain dit pô cha chez les ch'tis !
Ché cé Ché belches qu'ain koz aut' main qu'ainchi !!
avec septante et tout' ch' tralala !!!
;-)
Pétard ! Pas facile de décrypter...:-)
SupprimerVu du massif central, les ch'tis, c'est le nooooord. Lors d'un séjour la-haut, près de la frontière, j'ai pu constater qu'il n'y avait pas que les Belges qui causaient ainsi.
C'est pareil pour les provençaux, le nord commence à Orange.
Effectivement, "septante, nonante", je l'ai entendu chez les Belges mais aussi chez les Suisses et certaines régions frontalières d'iceux (Jura)
SupprimerPS pour Alain : j'aime bien entendre/lire du chti !
C'est superbe, tes mots collent à tes réalisations, tes meubles sont superbes, vraiment.
RépondreSupprimerQue d'amour en ce métier, il est vrai que le bois es noble et tu le transforme à merveille.
Ces quatre bouts de bois t'ont réchauffé le coeur à la manière de Brassens, joli morceau de guitare.
J'aimais ce style avant même de savoir que c'était du louis XVI. l'amour du travail du bois, c'est mon père qui me l'a donné. En plus d'être paysan, dans sa jeunesse, il avait été menuisier.
SupprimerCe premier meuble a été entièrement fabriqué avec du bois de "chez moi". J'veux dire par là, avec du bois de mon village.
Bonsoir xoulec , pas de chance pour moi , je ne te donnerais pas la main pour faire de la menuiserie , j'ai deux mains gauche incapable de bricoler sauf dans le jardin et la photo de divers insectes et fleurs sauvages ayant été forestier j'ai travaillé le bois en faisant des émondages et élagages puis des stères
RépondreSupprimerJe suis content que tu ais écris septante cela me remonte à ma prime jeunesse ardéchoise où à l'école nous comptions ainsi septante octante nonante. Puis un jour étant en région parisienne dans nôtre nouvelle école c'était soixante dix j'ai donc écrit septante le petit ardéchois s'est fait foutre de lui par les parigots du coin et j'ai eu un zéro et cent lignes à faire
Avoir deux mains gauches, n'est pas un handicap, quand on est gaucher. ;-) Je plaisante !
SupprimerL'utilisation de cette nomination des nombres, septante, octante, nonante, est très géographiquement variable. Je l'ai rencontré en Savoie et Haute-Savoie, le nord de la France.
Je ne savais pas que l’Ardèche aussi ! Dans mon cantal, avant d'avoir appris à prononcer les nombres en français, je les avais entendus maintes fois en patois.
Soixante-dix se prononce, avé l'accent : choissanté dix.
On entend donc, soixant'et dix, quatr'et vingt, quatr'et vingt dix. J'ai utilisé septante pour le plaisir et je dois dire, pour "dérouter" un peu.
Pas facile de montrer aux parigots du coin que tout ne tourne pas autour d'eux ! ;-)
Ha, la fameuse bibliothèque qui est à l'origine d'un touchant cadeau. Je ne vais pas commenter (une fois de plus) ton talent, ton habileté, ta dextérité .....tu pourrais te prendre pour André-Charles. (hi hi hi) Simplement je vais dire que je t'imagine en culottes courtes lorgnant ces planches comme une gourmandise pendant que d'autres enfants lorgnaient les caramels à un sou. Ton septante aussi me plait et fait vibrer mes racines ch'ti. Bonne journée.
RépondreSupprimerJ'ai hésité à publier ce billet accompagné des photos. La crainte de passer pour quelqu'un qui se la pète... De là, à me comparer à ce célèbre ébéniste, tu exagères !
SupprimerAux yeux de mon père, ces planches avaient de la valeur, qu'elles perdaient à vouloir les préserver. Depuis mon premier meuble, je m’efforce d'utiliser la totalité du bois que j'achète. Un arbre a donné son bois, sa vie, en quelque sorte. Ce serait sacrilège de laisser dépérir ce "trésor".
Amicalement
Je suis content d'avoir revu ta bibliothèque en photo. Je l'ai montré ma dulcinée qui a dit : — voilà, c'est exactement la sobriété que j'aime pour une bibliothèque
RépondreSupprimerDans un commentaire passé, tu disais ton impatiente à voir le résultat final... Je ne voulais pas te décevoir.
SupprimerJe constate aussi, que ta dulcinée a du goût ! ;-)
J'aime ce billet. Le fond musical à la guitare, tu me prends par les sentiments, là...
RépondreSupprimerEt puis, cette bibliothèque, et ce bois doux et clair qui me rappelle aussi un très beau cadeau qui m'a touchée au coeur.
J'ai toujours admiré les gens qui travaillent de leurs mains.
Et tu as des mains d'or.
Bisous transportés
•.¸¸.•*`*•.¸¸☆
Heureux que tu aimes ! Avec le temps, qui passe, je n'aime plus les meubles avec des teintes foncées ; surtout qu'avec le temps, ils foncent naturellement. Ils deviennent trop sombres.
SupprimerLe bureau et la console sont en chêne blond et le dernier en date est couleur naturelle ; avec le temps, le mobilier s'éclaircit...
J'ai aimé fabriquer ce cadeau de mes mains.
Je m'étais plusieurs fois essayé à cet ouvrage, sans y réussir, mais là, par une sorte d'inspiration divine, pour ne pas dire céleste, mais surtout par une approche différente du problème, j'ai réussi.
Te l'offrir et savoir que tu l’apprécies a été/est un grand bonheur.
Des bises Xoulecciennes
J'aime les meubles simples aux formes épurées, et de surcroît aux teintes claires, ton travail me plaît donc beaucoup, Xoulec. Bravo, tu as beaucoup de talent ! mais il est vrai que lorsqu'on est passionné comme tu l'es pour le bois, tu ne peux faire que du beau (sourire).
RépondreSupprimerBonne fin de soirée, bises bassoises.
Tu as raison, pour faire du beau, il faut être passionné.
SupprimerLes meubles, qui à mon sens, j'ai réussi et dont je suis assez fier, sont ceux dont je n'avais pas vraiment besoin. Je les avais fabriqués pour le plaisir, et naturellement, ils ont trouvé leurs places.
Bises Puydômoises
Quand je vois comme je galère à monter un petit meuble Ikea, je n'ose imaginer toutes les pièces et tout le travail pour cette dernière bibliothèque, en partant de zéro... J'aime beaucoup le bureau aussi.
RépondreSupprimerQuant au trésor perdu, c'est un peu le sujet de ma dernière note, le "plus tard, trop tard... "
Ben, moi aussi, il m'arrive de monter des meubles suédois... quel bazar ! Une fois que l'on a terminé, on se dit « finalement, c'est facile ! ».
SupprimerPour mes meubles, aussi, c'est facile ; c'est parce que c'est moi qui les aie pensés...
A titre d'information, pour cette bibliothèque, je n'ai pas compté mon temps. J'estime, que j'ai passé environ plus de 150 heures et moins de 200.
La fabrication du bureau et de la console, s'est étalée sur un peu plus de deux ans. J'étais bien moins équipé, cela m'a pris plus de temps.
Quant à ton trésor perdu, j'ai lu chez toi ; cela m'a rendu les yeux humides...
Je ne t'imaginais pas acheter du suédois. Comme quoi...
SupprimerJe trouve que entre 150 et 200 heures ce n'est pas beaucoup pour ce résultat. J'aurais estimé au triple, si on m'avait demandé un chiffre. Mais as tu compté le temps pendant lequel tu as pensé ton meuble ? Ça compte aussi, et c'est même l'essentiel non ?
Oulala ! Je n'ai jamais acheté de meuble suédois ! C'est pour d'autres que je fais parfois le montage.
SupprimerSinon, quand il me faut du meuble "bon marché",je le fabrique directement à mon boulot, cela ne me coûte rien. Si je compte le temps"pensé", c'est beaucoup plus...
Coucou. Moi qui suis nulle pour planter un clou! J'admire tes créations mais tu sais celle que je préfère, c'est le bureau! Elégant, il appelle presque au travail. :-) Bises alpines.
RépondreSupprimerCe bureau ne fait pas exception, je l'ai fabriqué alors que je n'en avais pas vraiment besoin. C'était pour finir d'utiliser le bois dont je m'étais servi pour confectionner la table de ferme de mes parents.
SupprimerIl appelle au travail, mais avec modération, quand même !
Bises puydômoises
Comment ce billet a-t-il fait pour ne pas apparaitre chez moi dans ma liste de lecture ? Tu as des mains en or et tu les exploites mieux que ceux qui ont de l'or dans les mains ne le font des leurs. Ta bibliothèque est un trésor et j'aime sa simplicité ton argentier et ta console sont impeccables pour garnir de petits espaces, c'est exactement ce que je recherche pour chez moi. Dommage que tu sois si loin !
RépondreSupprimerJ'aime beaucoup ta deuxième phrase. La console et le petit argentier sont, ce que l'on appelle, des meubles meublant. Ce qui veut dire qu'ils servent autant de mobilier que de décoration. J'aime fabriquer des meubles, plus par envie que par besoin ; c'est justement ce qui me fait aimer le travail du bois.
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