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samedi 27 avril 2024

Rencontre du troisième type...

 

Longtemps, il eut son image de plantée dans les yeux. Où qu’il regardait, il la voyait, Au milieu d’une foule, même sentimentale, il lui semblait l’apercevoir. Il savait que c’était impossible, mais il savait aussi que parfois l’impossible peut devenir réalité… Peu à peu, sans s’en rendre compte, son image s’estompa, s’éloigna de sa mémoire, et ses yeux commençaient à penser que ce visage n’était pas si mal dans le décor de sa vie.  

Le temps tira un trait, il l’oublia. Il oublia les traits de son visage, devenu trop flou. De nombreuses années plus tard, par un mystérieux hasard que la vie se chargea de glisser sous ses pas, il apprit qu’elle vivait à deux pas de son lieu de travail. Il est même probable qu’ils se soient croisés, sans se reconnaître.

Il présumait,  qu’après tout ce  temps, il ne saurait. L’image datait d’une autre vie. Son physique, si fortement imprimé dans sa tête, avait peut-être fini par insensibiliser sa rétine.

À la faveur d’un autre de ses coups de hasard, ils se croisèrent. Ils se regardèrent, se dévisagèrent, se reconnurent peut-être. Une sorte de réminiscence d’un lointain souvenir se fit. Il tenta quelques mots : 

« Bonjour, vous êtes celle que je pense que vous êtes ?» Un  « oui » apporta la confirmation attendu. Son visage s’illumina en miroir du sien. Une illumination qui en disait bien plus que des mots. Bien sûr, le temps avait passé, bien sûr, ils avaient changé, bien sûr, ils avaient mené leurs vies respectives. Tout aussi sûrement, ils se jurèrent de se revoir, comme de vieux amis, tout en sachant que cela n'arriverait pas. Comme ses phrases que l’on dit sans conviction. Restons amis.

En partant, il regarda cette vieille cicatrice comme si elle n’était pas sienne, un peu étonné et surpris de redécouvrir le feu d’un ancien volcan, définitivement trop vieux.

 

20 commentaires:

  1. parfois, il vaudrait mieux pouvoir ne garder que le souvenir ...
    C'est comme ces lieux d'autrefois sur lesquels on retourne tant d'années plus tard et qu'on a du mal à reconnaître, bien qu'ils n'aient pas changé ..

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    1. Avec le temps, nous changeons. Notre façon de percevoir, d’appréhender les choses, les lieux, les gens, est différente, alors que le souvenir est resté figé. Le retour au temps présent peut faire l'effet d'un choc.

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  2. Il y a les souvenirs, les regrets aussi peut-être, d'un bel amour vécu ou inachevé, qui nous font retourner régulièrement dans le passé. Et puis il suffit d'une brève rencontre avec cet être idéalisé, des années après, pour réaliser que le feu que l'on entretenait en pensée depuis des années, n'existe plus, le temps a passé, et le feu de cette relation est définitivement éteint. C'est une désenchantement, mais aussi une sorte de soulagement. Un très beau texte, Xoulec, j'aime beaucoup.
    Bon après-midi, pluvieux chez moi. Bises bassoises.

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    1. Ton antépénultième phrase est très juste « C'est un désenchantement, mais aussi une sorte de soulagement » C'est, je crois, ce qu'il a ressenti.
      Bonne fin de journée, pluvieuse ici.
      Bises puydômoises

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    2. Ton commentaire aussi, est très juste, et vrai.

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  3. En faisant une telle rencontre, on prend conscience du temps qui passe, des traces qu'il laisse sur un visage, des mains, une allure. Finalement, ne vaut il pas mieux garder un souvenir ? Tout es dit dans ta dernière phrase.

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    1. Le souvenir était beau, le réinitialiser l'a quelque peu écorné.

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  4. Tu sais, même un vieux volcan peut se réveiller. Si, si... Bises alpines.

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    1. Je ne souhaite pas que le vieux volcan qu'est le Cantal se réveille. Il est le plus vaste stratovolcan d'Europe (70 kms de diamètre). C'a risquerait de secouer pas mal. Par ailleurs, le feu qui rejaillit d'un ancien volcan qu'on croyait trop vieux, secoue aussi pas mal...
      Bises du massif central

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  5. Il est vrai que les yeux parlent souvent mieux que nos lèvres, ils sont déjà à l'origine de ce qui fait battre notre coeur à la chamade, parfois l'histoire se termine encore avec les yeux lorsque les larmes s'écoulent.
    J'espère qu'ils se retrouveront quand même..............

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    1. Je ne suis pas aussi optimiste que toi. Je crois, qu'au fond de lui, il n'a pas très envie de retrouvailles, post mortem. Comme dans une chanson d'un chanteur que j'affectionnais plus jeune, quand le désir s'en va, tout s'achève avec lui...

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  6. Une histoire vraie ? En tout cas, le terreau d'une belle histoire un peu triste : celle de l'amour enfui et jamais retrouvé...La chance n'a pas été saisie à temps.
    Il est parfois des regrets qui ont le goût des souvenirs, et lycée d'versailles.
    Un rien nostalgique, mon ami ?
     •.¸¸.•*`*•.¸¸☆

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    1. La chance est passée, bien qu'elle offrait une certaine prise pour la saisir. Elle s'est délitée entre ses doigts. Une histoire avec une grosse part de vérité et un soupçon d'imagination. Une douce nostalgie a été source d'inspiration.
      Bises de ma campagne pluvieuse

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  7. Comme j'aime ces histoires fortes, un peu comme sur le site copaind'avant. C'est tellement émouvant. Vont-ils se revoir à l'avenir et continuer à rester en relation ? Bonne soirée. Bises.

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    1. Ben, moi aussi, j'aime les histoires fortes, mais celle-ci en a perdu beaucoup... Le souvenir était plus fort.
      Bises d'Auvergne

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  8. Encore un texte fort, évocateur, autant par le sujet que la manière subtile dont tu l'écris. C'est tellement d'une grande justesse et j'ai le sentiment que beaucoup doivent s'y retrouver au regard de leurs propres histoires et ses souvenirs.
    Il m'est arrivé de vivre « l'autre côté de la médaille ». En vacances en bord de mer il y a quelques années. On s'est croisé plusieurs fois dans le petit bourg où sont les magasins pour l'ordinaire. Elle m'a salué, moi aussi. Tout le monde se dit bonjour en vacances. Une autre fois elle s'est avancée : « Vous vous appelez Alain il me semble ? » Et là j'ai reconnue à sa voix. Mais elle avait tellement, tellement changé. Je me souvenais d'une jeune fille vive et svelte, on avait eu une brève aventure sur les bancs de la faculté… enfin pas que sur les bancs… j'avais devant moi une femme aussi âgée que moi et plutôt en surpoids. Elle aurait bien voulu « qu'on se revoit ». Ça ne s'est jamais fait. Mieux valait garder le bon souvenir de cette époque de l'insouciante jeunesse.

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    1. C'est assez souvent grâce à la voix que l'on reconnaît celui ou celle que les yeux peinent à identifier. Avec le temps, les souvenirs sont quelque peu idéalisés. Comme des vestiges d'un temps révolu. Comme je le dis à Ambre, un peu plus haut, la réinitialisation peut faire l'effet d'un choc. On peut même se surprendre à penser qu'est ce qu l'on a bien pu y trouver ... Les atomes crochus n'accrochent plus.

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  9. Des retrouvailles avec un camarade de lycée, des années après, m'ont laissé un goût amer car, j'avais beau chercher l'adolescent que j'avais connu dans ses traits vieillis, sa belle chevelure noire dans sa calvitie et l'étincelle qui animait son regard espiègle, je n'ai rien retrouvé ou si peu. Plus tard, j'ai bavardé avec un autre camarade au téléphone. J'ai tout reconnu, la voix, le ton, le style. Il m'a dit j'espère qu'on se reverra mais je n'en ai pas eu envie. Je laisse les souvenirs où ils sont. Ton texte raconte exactement ce que l'on ressent dans ces moments-là.

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    1. Comme toi, je préfère laisser où ils sont, les souvenirs enfouis des camarades de classe ; sur des photos jaunies du même nom, bien rangées dans un coffret à souvenirs que je n'ouvre que pour en ranger d'autres. C'est trop loin, et nous n'avons plus rien en commun.
      Des retrouvailles au goût amère ne me tentent pas du tout.

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