Le carrefour était dangereux, c’était un fait. J’empruntais cette route tous les jours, et il n’était pas rare de constater régulièrement les restes d’une collision, ou bien un véhicule accidenté, sur le bas-côté. La priorité, qui était à droite, n’était manifestement pas adroite… Elle se révélait même être un piège fatal. Aussi, après plusieurs années, les autorités compétentes décidèrent de modifier le carrefour. Un superbe rond point, comme il en fleurit, même où il n’y en a pas besoin, vit le jour. Certains disaient que c’était pour em...... ♫♫♫ Le peuple, dans ce cas précis, il s'avérait indispensable.
Il n’y eut plus d’accident grave. De temps à autre, je constatais que quelques automobilistes, épris de vitesse, s’autorisaient à traverser sur le terre-plein central ; la négociation de la nouvelle intersection avait toutes les chances de se terminer dans le champ en contrebas. De deux maux, il fallait choisir le moindre, et ce, en une fraction de seconde.
C’était une nuit sans lune, noire comme un Soulages… seules deux raies de lumière, dirigées vers les étoiles, la transperçaient. Dans cet éclat de lumière, je distinguais des badauds qui badaient ; ce qui est le propre des badauds. Mes yeux remontèrent le flux lumineux jusqu’à sa source ; une voiture sur le toit, fraîchement retournée. J’adaptai ma vitesse, et distinguai des ombres, qui n’avaient rien de Chinoises, se mouvant à la lueur de frêles flammes de briquets.
Je ne voulais pas grossir la foule des curieux, mais, pour m’être retrouvé un jour, ou plutôt une nuit, dans cette situation inconfortable, je décidais de prêter main-forte. Dans le cadre de mon travail, j’avais toujours, dans mon véhicule, une puissante lampe de chantier. Une lampe à l’aide, précieuse… J’apportai donc mes lumières, en allant à la rencontre des ombres de la nuit.
- Des blessés, demandais-je ?
- Non, je n’ai rien, répondit la négociatrice malchanceuse.
Les flammes vacillèrent et s’éteignirent de concert, tandis que les ombres se dissipaient. La conductrice profita de ce nouvel éclairage pour récupérer quelques affaires. Les téléphones portables n'existaient pas encore, aussi, il fallait se faire secourir par ses propres moyens. Elle se rendait dans la cité des bitords**… moi aussi. Naturellement, elle devint ma passagère.
En chemin, elle me conta sa mésaventure, sa peur. Le rond-point mal appréhendé ; la force centrifuge qui expulse vers l’extérieur, les roues qui mordent le gravier du bas-côté, et dans l’air du soir, sa Volkswagen s’envola dans les fougères, loin des nénuphars, fin de la ballade...♫♫♫
Vingt minutes plus tard, je la déposais devant le calypso… c’est là que je remarquai son ventre arrondi, et osai un conseil…
- C'est gentil de vous inquiéter, merci. Je vais appeler mon mari, ça va aller, merci encore.
Chaque fois qu’il m’arrive de passer devant cette enseigne, je repense à mon inconnue, qui sera à jamais mon inconnue du calypso.
Tu es charitable et je n'en doutais pas, finalement tu as secouru au moins 2 personnes..........
RépondreSupprimerSuperbe billet avec de jeux de mots geniaux. bravo pour cette leçon de style.
Bises Auvergnates
Merci cher Eve. C'est mon côté cantalou qui s'est exprimé ; apporter son aide, être efficace. À l'époque, je ne savais pas que j'en ferai un billet.
SupprimerIl m'est arrivé un peu la même chose, je raconterai un jour...
Bises d'un Cantalien
J'aime lire tes petites histoires touchantes. J'ai envie de croire que celle-ci est vraie. J'ai réécouté La ballade de Jim de Souchon avec plaisir. Une chanson qui s'inscrit dans une époque et qui me touche toujours.
RépondreSupprimerSur la centaine de billets que j'ai écrit, seuls trois ou quatre, peut-être cinq sont de pures fiction, mais avec une inspiration de faits réels.
SupprimerCette histoire est parfaitement vraie. J'ai juste un doute sur la date, je ne sais plus vraiment. C'était en octobre/novembre/décembre 1995 ou 16.
Quant à la ballade de Jim, souvent, quelques paroles de cette chanson reviennent dans mes billets. J'affectionne particulièrement " la Chrysler qui s'envole dans les fougères et les nénuphars". Sans les chansons en tête, je ne saurai écrire un texte. Il me faut le petit "déclic" qu'une chanson peut me donner.
C'est vrai que certaines paroles de chanson nous aident à partir loin dans nos idées et celles pourtant toutes simples de Souchon sont efficaces.
SupprimerDes paroles efficaces, simples et inspirantes.
SupprimerLes flammes vascillèrent mais elles avaient peut être allumé un feu ou du moins un espoir dans ton coeur ? Après tant d'années, l'enseigne est encore là !!
RépondreSupprimerJe ne me suis pas brûlé aux flammes vacillantes. Du moins, pas celles-ci...
SupprimerLe souvenir est toujours là, l'enseigne aussi ; toujours en activité. La photo date de la semaine dernière.
Coucou. C'est une histoire qui finit bien. Ah, si les ronds-points pouvaient parler, ils en raconteraient des histoires! Bises alpines.
RépondreSupprimerCoucou, oui, un accident sans gravité. Heureusement que les ronds-points ne parlent pas, enfin, celui-ci, sinon je n'aurai rien eu à écrire... ;-)
SupprimerBises Auvergnates
Il arrive ainsi de rencontrer des personnes dans des circonstances bien particulières, rencontres éphémères mais qui laissent pourtant en nous un souvenir impérissable. Tu n'oublieras pas cette dame et peut-être qu'elle ne t'a pas oublié non plus. Belle fin d"après-midi, Xoulec. Bises altiligériennes.
RépondreSupprimerLe must serait que cette femme, par un formidable coup de hasard, découvre l’existence de ce blog et particulièrement de ce billet. Ça, c'est un truc qui me plairait...
SupprimerBelle fin de semaine.
Bises puydômoises
RépondreSupprimerC'est toujours un plaisir subtil de te lire, même si comme cette fois le texte relate une situation qui aurait pu tourner au tragique. Outre la qualité du texte tu as le sens du service indéniable qui n'est pas aussi répandu qu'il faudrait. Elle avait quand même pris des risques, ayant son ventre rond.…
Ça ferait un bon titre de roman : « l'inconnue du Calypso ». Rien que le titre suscite l'achat…
merci de témoigner de choses positives. Ça fait grand bien.
(Accessoirement j'ai fait la connaissance des bitords !)
Je ne saurais expliquer d'où vient ce sens du service, de l'aide, de l'entraide. Dans le Cantal de mon enfance, c'était assez répandu ; probablement lié aux conditions de vie, qui était assez dure, assortie d'un climat rude.
SupprimerLa géographie, le climat de l'endroit, la vie presque en autarcie nous façonnent sans que l'on ne s'en rende compte.
Cela dit, si je n'avais pas été équipé d'un projecteur puissant, je ne crois pas que je me serais arrêté. Il y avait déjà pas mal de monde, et je ne me serais pas ajouté aux curieux...
Alain a de la chance, moi j'ai suivi ton lien et il fallait être abonné à la Montagne pour savoir pourquoi les Bitords.
RépondreSupprimerUne lampe à l'aide...rhôô ! jouissif.
Il t'en est arrivé des aventures en bagnole dans ta vie...Ce n'est pas la première fois que tu nous narres une rencontre qui est restée virtuelle, avec un semi-brin de regret dans la voix... Un jour tu nous raconteras peut-être celle qui a marché, et qui t'a fait devenir papa :-)
Bon en tout cas, tu es toujours affûté question écriture. Ça fait bigrement plaisir.
Bises de retour
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Des aventures en bagnoles, pas seulement. En moto aussi...
SupprimerMerci pour l'écriture affutée, à moi aussi, ça me fait bigrement plaisir.
Spécialement pour toi, mais aussi pour celles et ceux qui liront plus loin que le simple texte. Je me suis procuré des identifiants pour avoir accès à la totalité de l'article.
« Mais pourquoi appelle-t-on les habitants de Thiers des "Bitords" ?
Thiers est souvent prénommée la cité des Bitords. Mais savez-vous pourquoi ? Pierre Contie, adjoint délégué au patrimoine à la Ville, livre les secrets de ce gentilé original.
Par Fanny Guiné
Publié le 26 juillet 2023 à 06h35
Tout commence au XVIe siècle, du temps où la rivière Durolle n’était pas encore ensablée, et où le commerce fluvial battait son plein à Thiers. Le blason de la ville (visible notamment sur la façade de la gendarmerie) – un navire trois-mâts voguant sur les flots – symbolise justement la puissance du commerce thiernois à cette période.
"Le bitord était à l’époque le nom donné à un cordage qui servait à tirer des embarcations à fond plat, comme celles qui étaient sur la Durolle".
Thiers possédait un petit port, en bas de la cité, aux alentours de l’actuel pont du Navire.( pont du navire que l'on voit sur la photo de la montagne, et que l'on devine sur la gauche de ma photo ) Ces cordages, donc ces bitords, étaient tirés dans l’eau par des condamnés, des bagnards. Et au fil du temps, on leur a associé le nom de la corde. Par extension, le bitord est devenu la personne qui tirait cette barque".
Ce n’est pas tout : sur cette embarcation à fond plat, l’accroche du cordage, une petite poutre en bois, était prénommée un bitton. Par extension là encore, la personne chargée de la manœuvre du bateau était désignée sous ce même nom de bitton.
À l’époque, se faire traiter de bitord était donc une insulte en référence aux bagnards !
Une définition beaucoup plus positive désormais
Mais l’usage du mot est devenu beaucoup plus positif, car bitord et bitton ont été confondus en un seul mot ayant la même signification. Dès le XIXe siècle, on désigne le Bitord comme "l’habitant de Thiers". Et aujourd’hui, la définition reste la même et sa signification est beaucoup plus affectueuse : "Un Bitord est une personne brave, qui n’hésite pas à aider les autres."
Il y a peu de textes existants qui évoquent cette histoire et ces deux noms. Mais Pierre Contie note la représentation "très probable d’un bitton" en l’Homme des bois, cette sculpture qui se trouve sur une maison médiévale, rue de la Coutellerie.»
Fanny Guiné
Bises de la nuit
Merci pour l'article. Très touchée.
SupprimerC'est toujours intéressant de connaître le fin mot...
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Merci pour ce texte bien écrit et si touchant ! Pour la découverte d'un nouveau mot, aussi.
RépondreSupprimerBonne semaine !
(Détail : la "promenade", c'est balade avec un seul l)
Merci de ton commentaire. Un nouveau mot qui n'est pas facile à placer tous les jours ! Sauf peut-être au scrabble !
SupprimerQuant aux deux l, c'est pour le clin d’œil à celle de Jim...
Bonne fin de semaine, ici sous la pluie
C'est vrai que certains négocient mal les ronds points, on le voit aux traces laissées en plein milieu. Je pense aussi que la nuit, sans éclairage public, il est difficile de voir. Une fois j'ai évité de justesse un cycliste qui arrivait sur la gauche au moment où j'allais prendre un rond point dans le noir complet. J'ai vu heureusement la petite lampe sur le vélo. Il faut dire quand même que le cycliste roulait vite. Bonne fin de journée.
RépondreSupprimerGénéralement, quand il y a des traces, c'est qu'il y a eu aussi, une belle frayeur... Les cyclistes aussi doivent avoir leurs lots. Très souvent, ils ne sont pas assez visibles, et ce n'est pas la petite loupiotte qui leur sert de phare qui contribue à leur visibilité. Mais par une nuit noire, ne pas se signaler suffisamment, relève, à mon sens, de l'inconscience.
SupprimerBon week-end