Le feu m’a toujours fasciné, pas vous ? C’est peut-être la danse des flammes qui
hypnotise, comme la flûte du joueur, ou du charmeur de serpents.
Enfant, nous
avions interdiction d’y toucher. Le feu était maîtrisé, capturé, prisonnier de
la fonte, complice de mijotages culinaires.
Synonyme aussi de chaleur humaine.
L’hiver, nous nous y « coucourlions » autour, comme le vestige de notre
passé préhistorique.
Et puis, il y avait le feu que nous avions le droit de toucher… Celui que mon père maîtrisait, en
réduisant en cendres des montagnes de branchages, dont les troncs et les
grosses branches serviraient à alimenter l’industrie papetière. La consigne
était stricte : on ne joue pas avec le feu, car lui ne joue jamais. Ce n’était
pas vraiment par sa maîtrise du feu de
forge que mon père m’impressionnait le plus, mais par la pratique de
l’écobuage. Opération plus compliquée qu’il n’y paraissait. Il ne suffisait pas de
craquer une allumette, fut-elle suédoise, n’importe comment. Le risque
d’embraser la campagne était bien présent. L’espace de quelques heures il était
le maître du feu, en maîtrisant lui-même les éléments.
S’adapter à la
topographie, évaluer et surveiller la force et la direction du vent, se
prémunir d’un coupe-feu, naturel ou artificiel, tout cela faisait partie du
jeu. Je soupçonne qu’il devait posséder un sixième sens ; très souvent, la
pluie arrivait à point, comme l’ultime sécurité.
Au printemps, ces endroits-là,
n’avaient pas leurs pareils pour regorger d’escargots et de mousserons. Ce n’est
pas un hasard, s’il existe des plantes dites « pyrophytes », elles
ont besoin du feu pour vivre ou survivre.
Pour en savoir plus, c'est ici, (clic).
Je ne saurais parler du feu, sans
évoquer celui, intime, dont nous aimons la brûlure. Un feu en soie, juste là, à
l’intérieur.
D’abord charmeur, puis ravageur, attirés que nous sommes comme des
phalènes, par la lumière subtile d’une brune ou d’une blonde à la croupe
incendiaire. Il faudrait être professeur de droit, pour ne rien faire de
travers, et encore… S’irradier ensemble
dans une fusion nucléaire ; les noyaux fusionnant un instant, pareils à
deux comètes entrées en collision pour se recomposer en s’éloignant.
Comme
toute action, il y a réaction, dégagement d’énergie, production de
chaleur ; le feu, quoi !