La journée avait commencé sous les meilleurs auspices, sans pour cela habiter Beaune. Nous avions une quarantaine de réservations et l’auberge dans laquelle nous officiions, commençait à bien tourner. Faut dire que la spécialité de la maison ravissait les papilles et rassasiait les plus gourmands. Nous faisions même des envieux.
Personne ou presque ne prêta attention à la fille qui venait de s’installer au bar. Elle se pausa comme un nuage, sans ombre, demanda un verre d’eau et la possibilité de remplir sa gourde. Nous avions affaire à une randonneuse à vélo. Une fille courageuse ou un peu folle, car il fallait certainement une certaine dose des deux pour propulser un vélo, bardé de sacoches, sacs à dos et matériels de camping sur les routes du Cantal, par un soleil de plomb. Elle voyageait seule, dormait où elle trouvait et ne craignait que les chiens des fermes, dans la traversée des villages.
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C’était un dimanche ordinaire pour notre association de bienfaiteurs. Le service était terminé, la recette avait été bonne, et nous partagions les derniers verres de l’amitié, agrémentés de tartes aux pommes. Par politesse, elle refusa la part que nous lui proposâmes. Puis, devant notre insistance, elle en accepta même une deuxième. La glace était brisée, et elle confia, à mots couverts, qu’elle n’avait rien mangé depuis deux jours. Son budget très serré, ne lui autorisait aucun écart. À ces mots, madame V……, la cuisinière, ne resta pas insensible à ce petit bout de femme, et lui prépara illico un repas. Certes fait de reste, mais tout à fait honnête. Repas qu’elle refusa en invoquant le fait qu’elle n’avait pas de quoi régler l’addition.
Mais qui parle d’argent ? Nous nous exclamâmes !
Revigorée, elle reprit son vélo pour rejoindre le camping de R….., où elle avait un rendez-vous/étape. N’allez pas croire que nous nous sommes comportés comme des goujats, nous lui avons proposée de la véhiculer. Elle refusa catégoriquement. Quelques semaines plus tard, alors qu’elle avait regagné sa cité universitaire, une carte postale arriva tout aussi discrètement qu’elle. Ma mémoire défaille un peu, cependant, les mots m’ont accroché. Et même si le verbatim n’est pas fiable à cent pour-cent, il l’est à au moins quatre-vingt-dix-neuf.
« Pédaler sous les étoiles n’a jamais été aussi agréable, surtout avec le ventre plein et le cœur réchauffé à la manière d’un feu de joie. Un grand merci pour votre hospitalité, votre générosité, (ce n’est pas comme ça que vous allez devenir riche…). C’est la première fois que je fais un aussi bon repas en commençant par le dessert. »
C’est dingue, mais parmi la quarantaine de personnes que nous avons croisées, ce jour-là, seule cette fille a su graver nos mémoires de son empreinte.
* : Photo du net
La légendaire hospitalité Auvergnate..............qui fabrique d'aussi beaux souvenirs.
RépondreSupprimerTrès beau billet.
un autre beau souvenir https://www.youtube.com/watch?v=OQ2s9r7MGZA
Heu, légendaire ! J'ai des doutes ! L'hospitalité n'est pas inhérente aux Auvergnats, enfin, j’espère...
SupprimerJ'en connais plein qui n'auraient pas fait comme nous.
Merci pour la bicyclette de Montant, mais un peu trop connu, à mon goût.
Une bien belle histoire , illustrée par une trés jolie photo. Belle journée.
RépondreSupprimerUne histoire vraie. D'ailleurs, je ne sais pas vraiment raconter des fictions.
Supprimerbelle journée de samedi, quand on aime la pluie ! heureusement une journée chasse l'autre.
Bonne semaine
Et poétesse en plus la randonneuse courageuse ! (Jolie ?)
RépondreSupprimerC'est curieux comme on a des souvenirs comme ça qui restent marquants.
Je me souviens d'une femme encore jeune qui longeait le bord de mer avec un vélo bardé d'un attirail imposant pour vivre (survivre ?). On était au coucher du soleil, un soir d'été. Elle contemplait la mer. Où allait-t-elle dormir ?
Elle n'avait rien de vraiment bien extraordinaire. Ma compagne et moi on s'amusait à lui inventer une vie extraordinaire.
Et le lendemain j'écrivais une nouvelle, inspirée de ce petit événement qui n'en était pas un.
La nouvelle figure dans un de mes recueils.
Poétesse ! Je ne m'étais pas rendu compte, à l'époque, que le grand Georges l'avait inspiré.
SupprimerJolie ou pas, fille ou garçon, je crois que nous aurions agi de la même façon. Pour répondre à ta question, je ne m'en souviens plus ?
Quelque part, j'admire ce genre "d'aventurière". Il me semble qu'elle nous avait dits qu'elle aimait ce genre de vacances.
La rencontre a été riche, la preuve, c'est qu'on s'en souvient encore ; d'ailleurs, je suis sûr qu'elle aussi.
Bon, il va falloir qu'un jour, je me décide à essayer de jeter un œil sur ton recueil de nouvelles...
Le titre "A vélo vers l'éternité" suscite ma curiosité. Je me l'offrirais bien, un jour.
J'avais fait un billet sur ce très beau livre de notre ami...
Supprimer•.¸¸.•*`*•.¸¸☆
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@ Célestine
SupprimerJe viens d'aller relire ton billet. Et les commentaires. Je n'avais pas oublié mais j'ai savouré autrement. Avec le recul je vois mieux les atouts et les faiblesses de ce petit recueil. Je devrais m'y remettre.
Narcissiquement ça me ferait du bien… après tout en période de covid…
à Célestine
SupprimerJe dois t'avouer que je ne m'en souvenais plus, merci. 27 novembre 2016, je balbutiais des commentaires, mais ta chronique m'avait laissé sur c.., pour quelqu'un qui disait que d'autres savaient mieux faire... Je ne vois pas comment !
Il y a ainsi des personnes qui illuminent notre journée et qui laissent des traces de lumière sur notre chemin. Cette fille en était (sourire).
RépondreSupprimerJolie histoire, Xoulec. Merci.
Bonne fin de soirée. Bises bassoises.
Et Xoulec a illuminé la sienne. ;-)
Supprimer@ Françoise
SupprimerC'est cela même ! Je pense pouvoir dire aussi que nous avons marqué le sien, de chemin.
Bises Puydômoises
@ Dédé
Je n'étais pas seul... ! Mais nous étions tous d'accord pour lui offrir le couvert, même en commençant par le dessert.
Bises du massif central
Oui, bien sûr, vous avez illuminé son chemin à elle aussi ! (sourire)
Supprimerje me sens de plus en plus chez moi sur ce blog...
RépondreSupprimerUne belle histoire de bicyclette, de solidarité, une allusion au grand Georges, de la magie, des étoiles, un zeste de glamour, et même ta nouvelle police d'écriture qui m'est familière ;-)
Je suis sûre qu'il y a une paire de pantoufles pour moi dans un coin. Des pantoufles de vair, bien sûr. ;-)
Bises célestes
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Pour la police, je dois dire que je n'arrive pas en à trouver une qui me convienne. Je vais sûrement changer...
SupprimerJ'ai mis des plombes pour trouver sur World, autant pour ma messagerie "public", la "privée", je n'y touche pas.
Alors, sur blogger, ce n'est pas gagné !
Bises Xoulecciennes
Au secours, qui a ingurgité mon com déposé juste après celui d'Alain. Ce n'est certainement pas cette cycliste; Certes elle est repartie le ventre plein mais surtout le coeur gonflé de votre chaleur humaine, de votre générosité de sentiments ; C'est une très belle histoire que tu nous livres et Que tu as eu la chance de vivre.
RépondreSupprimerTon commentaire, comme beaucoup d'autres, est quelque part dans les méandres de la blogosphère. En tous cas, je n'ai rien vu passer.
SupprimerHistoire qui remonte à mes jeunes années ; petite sœur, grand frère et une autre famille de paysans, faisions vivre une auberge paysanne.
Le cœur gonflé à la chaleur humaine est une assistance vélocipédique plus performante qu'une simple batterie.
Une simple recharge de temps en temps et les pentes sont plus douces.
Quelle jolie histoire !
RépondreSupprimerEt quel plaisir a dû être pour vous le retour reconnaissant et poétique de cette randonneuse. Un geste gratuit, mais qui est devenu précieux de savoir qu'il a été autant apprécié...
On ne s'attendait pas du tout à recevoir une carte, ce fut très agréable ; une sorte de reconnaissance !
SupprimerPeut-être que quelque part sur un blog, une femme raconte ses vacances Cantalienne, qui sait !